La greffe de cornée : Introduction

La greffe de cornée consiste à remplacer une cornée malade par un cornée saine. Cette technique de chirurgie ophtalmologique est tout à fait au point et est pratiquée dans de nombreuses cliniques et hôpitaux en France.
Les greffes de cornées (kératoplasties transfixiantes) permettent à de nombreux patients de retrouver une bonne vision alors qu’ils étaient porteurs d’une opacité de la cornée qui les rendaient, sinon aveugles, du moins malvoyants. On arrive à plus de 85% de succès. Mais ces résultats sont fonctions des maladies oculaires qui ont entraîné la greffe.
De nombreux contrôles sont réalisés pour être sûr de la bonne qualité du greffon et de son inocuité vis à vis du receveur.
Ces dernières années on a assisté à une diminution de la disponibilité des greffons cornéens car les familles refusaient beaucoup de laisser prélever les cornées.

Les indications de la greffe de cornée

On trouve comme indications principales

  • les dystrophies bulleuses après chirurgie de la cataracte (20 à 50% des greffes). Ce type de pathologie douloureuse est très amélioré par la greffe qui entraîne une disparition des douleurs et une amélioration nette de la vision
  • le kératocône (10 à 30%). Les patients sont opérés quand ils ne peuvent plus être équipés par des lunettes ou des lentilles, ou bien quand on constate une évolution défavorable de la cornée avec un risque de perforation spontanée.
  • les kératites infectieuses dont la kératite herpétique (10 à 20%). La kératite herpétique peut récidiver sur le greffon, ce qui nécessite un traitement antiviral tant que le patient est cortisoné. On greffe les yeux qui présentent une opacité stromale et qui n’ont pas eu de poussée d’herpès depuis au moins six mois.
  • la dystrophie de Fuchs (10%) et les dystrophies héréditaires. Ce sont des causes plus rares mais souvent bilatérales. Contrairement à la dystrophie de Fuchs qui est greffée vers 50 ans, on est amené à greffer très jeunes les patients dont la vue diminue à cause d’opacités importantes et familiales.
  • les échecs de greffes,
  • et les cicatrices post-traumatiques.
    Comme les techniques opératoires ont beaucoup progressé et que les dystrophies post-cataracte deviennent rares, il est probable que la répartition des indications va se modifier dans l’avenir

Greffe de cornee non perforante (Kératoplastie Lamellaire)

La greffe lamellaire consiste à remplacer la surface de la cornée par un greffon lamellaire, en conservant les couches profondes et notamment la couche endothéliale.

Les différentes méthodes de greffe lamellaire sont:

  • la Kératoplastie lamellaire automatisée
  • la Kératoplasie lamellaire profonde ou prédescemetique
  • la Kératoplastie lamellaire « Sandwich »
  • L’épikératoplastie (abandonnée)

Ceci présente l’avantage de réduire le risque de rejet ou de rupture traumatique de la cornée, les deux complications les plus sérieuses de la greffe perforante.
L’inconvénient de la greffe lamellaire classique est que les résultats optiques en sont parfois médiocres, en particuliers lorsque le kératocône est très avancé ou lorsqu’il persiste une couche de cornée autre que l’endothélium (greffe lamellaire superficielle ou automatisée, greffe sandwich).
La greffe lamellaire profonde prédescemétique est donc actuellement la méthode préférentielle, à utiliser dans tous les cas où elle est possible (absence de rupture descemetique préopératoire ou peropératoire). Il s’agit d’une technique chirurgicalement difficile, maîtrisée par très peu d’opérateurs. Les résultats optiques sont comparables à ceux de la greffe perforante, mais avec le bénéfice d’une plus grande résistance mécanique et d’un risque de rejet ou de défaillance endothéliale notablement réduit.

Greffe de cornEe perforante (Kératoplastie Transfixiante)

La greffe de cornée perforante (kératoplastie transfixiante) est la méthode chirurgicale classique utilisée en cas d’échec des lentilles de contact, quand le patient ne peut obtenir une vision utile avec ses lentilles de contact en raison d’opacité centrale ou paracentrale ou d’une intolérance au port de la lentille.
L’opération consiste à prélever un greffon cornéen de 7 à 8.5 mm de diamètre sur une cornée donneuse et à remplacer le centre de la cornée du patient porteur du kératocône par ce greffon.
On utilise pour cela des bistouris circulaires automatiques ou manuels (trépans) et un monofil de suture de nylon 10/0 (environ 10 fois plus fin qu’un cheveu). Les sutures sont enlevées à partir du 5ème mois et complètement au bout de 2 ans en général.
La greffe est bien tolérée dans la majorité des cas et 90 % des greffons restent clairs à 5 ans.
En moyenne l’œil opéré récupère un dixième d’acuité visuelle chaque mois pendant 6 à 10 mois. La vision finale, appréciée au bout d’un an, est de 6 à 10/10 dans la majorité des cas.
Il persiste souvent un astigmatisme nécessitant le port de lunette, de lentille de contact ou une révision chirurgicale.
Cette méthode tend actuellement à être remplacée par la greffe lamellaire profonde prédescemetique, qui offre le même bénéfice visuel avec une meilleure sécurité à long terme.

La procédure chirurgicale

L’intervention, généralement sous anesthésie générale, consiste donc à enlever la cornée malade et à la remplacer par la cornée du donneur.
S’il y a une cataracte importante, il est parfois possible de l’enlever dans le même temps opératoire. Seul l’examen de l’oeil permet de dire si cela est réalisable. D’autres chirurgies endoculaires sont possibles, vitrectomies, changement de l’implant, traitement d’un glaucome. Ces gestes opératoires sont alors faits ‘à ciel ouvert’.
La suture de la cornée greffée est un travail long et minutieux qui doit permettre un bon affrontement des bords de la cornée réceptrice avec le greffon. Il ne doit pas y avoir de différence de niveau.
On peut réaliser une suture par surjet ou par points séparés. L’intérêt des points séparés est de pouvoir les enlever progressivement plus tard, et ainsi mieux réduire l’astigmatisme.

  • Technique opératoire :
    elle diffère selon le type de greffe envisagé par votre ophtalmologiste. Dans la greffe habituelle, le greffon provient d’un donneur humain. Il existe un risque de rejet de la greffe. Dans l’autogreffe, la cornée transparente est prise sur l’un des 2 yeux du patient. Cette technique évite le rejet mais expose aux risques d’une double opération. Dans la plupart des cas, l’ablation de la cornée malade est réalisée à l’aide d’un trépan, parfois automatisé. Le greffon est suturé par des fils. La greffe de la cornée peut être combinée à une opération de la cataracte ou à celle d’un glaucome. La difficulté augmente avec la complexité de l’opération et les risques sont augmentés parallèlement. Une analyse anatomopathologique de la cornée peut être effectuée.
  • Incidents opératoires :
    La trépanation de la cornée peut être imparfaite, entraînant des difficultés pour la suture. Les anomalies découvertes par le chirurgien derrière une cornée opaque peuvent l’obliger à réaliser une opération plus complexe que celle initialement prévue. Une hémorragie peut se produire qui, en général, se résorbe en quelques jours. Dans des cas très exceptionnels, elle peut aboutir à la perte de la vision ou de l’oeil. Une réintervention peut être nécessaire pour compléter la suture ou pour corriger une anomalie non constatée pendant l’opération.
    De telles situations sont imprévisibles.
  • L’évolution postopératoire habituelle
    Dans la très grande majorité des cas l’oeil opéré est peu ou pas douloureux. La récupération visuelle est progressive. Les soins locaux sont réduits à l’instillation de gouttes ou à l’application d’une pommade et à la prise éventuelle de comprimés. Le port d’une protection oculaire est utile les premières semaines. Votre chirurgien vous indiquera les modalités de ce traitement qui peut s’étendre sur plusieurs mois. L’ablation des fils de suture peut être nécessaire. Il est possible de les laisser en place sans inconvénient. Il faut se souvenir qu’un oeil greffé sera pour toujours un oeil plus fragile nécessitant une surveillance régulière.
  • Les complications de la greffe
    Bien qu’elle soit de pratique ancienne et courante, l’opération de greffe de cornée n’échappe pas à la règle générale selon laquelle il n’existe pas de chirurgie sans risque. il n’est pas possible à votre ophtalmologiste de garantir formellement le succès de l’opération.
    Les complications graves de l’opération sont assez rares. Elles peuvent cependant aboutir, dans les cas les plus extrêmes, à la perte de toute vision, voire à la perte de l’oeil.
    Le rejet de greffe de cornée
    Les signes d’un rejet de la greffe
    Le patient doit les connaître et consulter son ophtalmologiste en urgence. C’est principalement:

    • une douleur
    • une rougeur de l’oeil
    • une gêne à la lumière (photophobie)
    • un larmoiment
    • une baisse de vision
    • L’augmentation de la pression oculaire.
    • Le traumatisme de l’oeil par le patient ou son entourage.
    • La déformation de la cornée greffée (astigmatisme) est très fréquente, parfois réversible à l’ablation des fils ou par une opération.
    • La perte de transparence spontanée du greffon touche surtout les greffes réalisées sur un oeil déjà opéré. Il n’y a pas de traitement. Une seconde greffe est possible mais son risque d’échec est augmenté.
    • Un oedème rétinien central.

Le rejet de greffe ne concerne pas l’autogreffe. Il se manifeste à partir des premières semaines après l’opération et jusqu’à 20 ans après celle-ci. Il peut être traité par des médicaments avec une certaine efficacité.
En cas d’échec de ce traitement le greffon reste opaque et la vision est très basse. Une seconde greffe est possible mais son risque d’échec est augmenté.
Les infections touchent 2 à 5 cas sur 1000.
Le greffon cornéen provenant d’un donneur a transité par une Banque de Cornée, qui a procédé à tous les tests de qualité requis par les textes officiels. Il n’est cependant jamais possible d’affirmer que ce tissu biologique ne sera pas susceptible de transmettre une maladie bactérienne, mycosique, virale ou à prion dont l’expression peut être immédiate après la greffe ou survenir beaucoup plus tard.

  • Evolution

    L’activité du patient sera réduite pendant les premières semaines car la cicatrisation doit s’effectuer avant d’envisager une activité normale. Il y a une une période d’observation de plusieurs mois qui va s’accompagner d’une diminution progessive des collyres instillés dans l’oeil opéré. Certains sports seront interdits définitivement à cause du risque élevé de traumatisme (boxe, karaté par exemple). Petit à petit les contrôles s’espaceront et le patient ne sera revu qu’une fois par an si tout va bien.
    Si une opération sur le deuxième oeil est prévue (comme pour le kératocône par exemple), le patient déjà inscrit sur la liste des greffes devra attendre quelques mois pour être greffé.
    Parfois des complications surviennent, peu graves comme une hypertonie transitoire, ou plus graves comme un rejet de la greffe de cornée.
    La greffe de cornée est une chirurgie bien codifiée qui donne de bons résultats et une acuité visuelle supérieure à 5/10ème chez 50 à 70% des patients ayant un greffon clair. La meilleure gestion des médicaments post-opératoires et la plus grande qualité des greffons doit permettre une amélioration progressive des acuités finales.